La phase 3 de notre initiative Stop aux incendies de forêt
Quelle était la phase I ? … Compréhension
Nous avons d’abord essayé de comprendre comment se fait-il qu’une si grande partie des forêts himalayennes soit brûlée chaque année. Comment se produisent ces incendies ? Certains d’entre eux sont-ils intentionnels ? Ou sont-ils plutôt d'origine naturelle ?
Après quelques années de recherche avec l’aide de stagiaires et de chercheurs, nous avons compris qu’une grande majorité des incendies de forêt sont intentionnels. D’où le grand « POURQUOI les populations locales mettent-elles le feu à la forêt ? » restait à répondre…
La subsistance des villageois locaux dépend des ressources naturelles. Nous avons compris que les incendies de forêt font partie de leurs pratiques visant à améliorer leurs moyens de subsistance, à très court terme, en toute simplicité et sans trop de considérations pour l'avenir des écosystèmes locaux.
En d’autres termes, les incendies de forêt intentionnels dans l’Himalaya sont en quelque sorte dus à la négligence, à la paresse et à la cupidité de l’humanité. La « tragédie des biens communs » semble être aussi le destin des forêts de l’Himalaya…
Eh bien, on peut se demander si les villageois sont conscients des conséquences des incendies de forêt ?
La plupart des personnes interrogées étaient parfaitement conscientes que mettre le feu à une forêt est une « mauvaise » action. Mais quand on leur demande encore pourquoi les gens font ça, ils essaient de changer de sujet, en terminant par une sorte de : « on ne sait pas qui sont les fous qui font ça ».
Beaucoup d'entre eux ont également rapporté que les villageois sans instruction pensent que la fumée des incendies déclenche la pluie, et ainsi en période de sécheresse on observe un pic d'incendies de forêt… (?)
C’est peut-être vrai, peut-être est-ce simplement un prétexte pour ne rien faire, peut-être un peu des deux. Dans une certaine mesure, les incendies de forêt sont tolérés par les locaux, et il y a donc une honte qui leur laisse un goût amer dans la bouche. Mais pas assez amer pour abandonner cette pratique.
Partant de cette compréhension, nous envisageons une manière évidente de démarrer notre projet « Stop aux incendies de forêt » par des actions concrètes : « Mettons tout le monde sur la même longueur d'onde, sensibilisons tout le monde aux conséquences réelles des incendies de forêt intentionnels ».
Quelle était la phase II ? … Campagne de sensibilisation
Lorsque l’avenir des forêts et des écosystèmes himalayens est en jeu, il ne devrait plus y avoir de place pour la superstition et toute autre information erronée qui sème la confusion dans l’esprit des villageois.
Nous avons décidé de lancer une campagne de sensibilisation.
De grands panneaux routiers ont été placés à des endroits stratégiques de la vallée de Tirthan, et des centaines d'affiches ont été placées dans les villages, les dhaba locaux et les magasins.
L'initiative a été chaleureusement accueillie par la population locale. Beaucoup de gens nous demandaient de leur donner des affiches afin qu'ils puissent les placer dans leur propre village.
D’une manière ou d’une autre, nous avions le sentiment d’avoir fait les bonnes choses. Mais après avoir eu plus de retours des villageois, nous avons compris que :
Même si les gens connaissent les effets néfastes des incendies de forêt, ils peuvent persister en raison des avantages à court terme qu'ils en retirent,
Si un seul villageois sur 1000 allume encore du feu dans la forêt, le projet est ruiné,
Il est très difficile d'apporter un changement dans la mentalité locale à cet égard, notamment parce que leur société est dominée par les castes et les hommes. Seuls les enfants peuvent avoir l’esprit prêt à accepter le changement de mode de vie nécessaire pour passer à des pratiques durables.
La phase III ? … Les enfants et le mouvement social
Mettre tout le monde sur la même longueur d'onde, c'est-à-dire comprendre que les incendies de forêt sont mauvais pour l'avenir de la communauté locale, pourrait ne pas suffire à arrêter les quelques pour cent de villageois qui mettent le feu aux forêts.
Nous avons remarqué que les individus locaux sont très sensibles à la pression et aux obligations sociales. Par exemple, personne n’oserait remettre en question le pouvoir ou l’existence des devtas (divinités) locales. Ou bien personne dans un village ne s’aventurerait à développer des opinions qui s’écartent du courant de pensée général.
Nous avons donc pensé que la création d’un mouvement social contre la pratique des incendies de forêt pourrait finalement créer la pression sociale nécessaire sur ceux qui le font pour qu’ils y mettent un terme.
Nous avons donné au mouvement le nom de « Je suis un défenseur ».
Avec l'aide d'un designer, nous avons développé le logo et nous prévoyons d'imprimer des T-shirts, badges et autres vêtements avec le logo associé à un message. Ceux-ci seront vendus à bas prix (à perte) aux populations locales qui pourront fièrement rejoindre le mouvement et devenir progressivement les ambassadeurs du projet Stop Forest Fires.
Parallèlement, nous nous préparons à agir dans les écoles.
Quelques locaux nous aident dans cette affaire. Poonam, employé par Himalayan Ecotourism, est formé pour faire des présentations dans les écoles. M. KD nous conseille sur la culture locale et nous aide à décider comment aborder la communauté et les enfants. M. Maghar Singh, Range Officer Banjar est également une grande source d'inspiration.
Les enfants recevront un dépliant coloré expliquant la problématique des incendies de forêt avec des mots simples et de nombreuses illustrations. Des affiches ont également été conçues et seront placées dans les salles de classe.
Enfin et surtout, un groupe de musiciens basé à Mumbai nous rejoindra au mois d'octobre. Avec nous, ils écriront et interpréteront une chanson de rap. Le texte sera une histoire satirique sur les incendies de forêt. Il sera accompagné d'une vidéo. Nous espérons que la chanson/vidéo deviendra virale afin que le message puisse se propager.